film

LES QUATRE SOEURS - BALUTY

Titre Original LES QUATRE SOEURS - BALUTY
Titre traduit
Réalisateur LANZMANN
Claude
Distribution
Production
Année 2018
Format DVD
Durée 64'
Langue Fr.
Musique
Distinction
Interprètes
Résumé Confession d’une femme juive qui, dans le Ghetto de Lodz, ayant été privilégiée, par un emploi qui la sauva, en ressentit, quasi toute sa vie, une culpabilité, courante chez les victimes, au contraire des bourreaux fiers de leurs crimes.
Diffusion
Droit 0
Festival
Genre Documentaire
Auteur du Commentaire Adolphe Nysenholc
Commentaire d'Imaj Dans sa série, Les Quatre Sœurs, sœurs en shoah, Lanzmann, toujours maître en art de la maïeutique, interroge ici une femme mûre qui était adolescente durant la guerre, Paula Biren, devenue médecin à New York. Elle est une femme qui respire la beauté et il doit la faire parler de l’horreur qu’elle a vécue. Elle a connu le ghetto de Lodz du premier jour au dernier, durant 4 ans. Baluty était le bidonville de cette ville et on en a expulsé les habitants pour y enfermer les Juifs. Le président du Conseil des Juifs (le Judenrat) instauré par les nazis, Chaïm Rumkovski *, qui dirigeait tout d’une main de fer, a sauvé un maximum de ses coreligionnaires en leur proposant de travailler… pour les Allemands, qui avaient besoin de main d’œuvre dans leurs usines. Car qui n’était pas utile était déporté par ces derniers. Et dès 1942, tous savaient déjà que les « camps » signifiaient la mort. Ce leader a compris qu’il pouvait jouer dans une certaine mesure la « collaboration » pour la survie de son peuple. Employée dans une fabrique de vêtements pour la Wehrmacht, Paula Biren a été sauvée. Et s’est sentie coupable quasi toute sa vie. Elle avoue qu’elle a été une privilégiée. Rumkovski, en idéaliste croyant dans l’avenir, avait créé un lycée avec une ferme, où les jeunes gens étaient formés, c’était son rêve ! pour partir au kibboutz en Palestine. Ils trayaient des chèvres, avaient à manger, mais étaient interdits d’emporter de la nourriture pour leur famille qui souffrait de la famine. Paula Biren s’en sentait mal. Après un an, comme diplômée, elle est d’abord préservée par le travail forcé jour et nuit dans un atelier de confection, et ensuite par un emploi dans la Police, qui utilisait aussi des femmes pour faire régner l’ordre dans les rues. Toute personne attrapée en flagrant délit de faire du marché noir était envoyée dans un camp d’extermination. Un jour une policière, dégoûtée de ce boulot, demande à Paula Biren, laquelle était officier dans un bureau, de l’accompagner sur la voie publique et d’assister à une arrestation. Ce fut celle d’un malheureux colporteur pris sur le fait, et donc, pour cette faute vénielle, condamné à la peine capitale. Paula Biren, du coup honteuse, voulut démissionner, mais c’était signer son propre arrêt de mort. Elle n’était pas encore au bout de son sentiment de culpabilité. Le jour où les Allemands ont exigé que les parents livrent leurs enfants pour qu’ils soient « mieux nourris » ailleurs fut des plus sombres. Son amie qui connaissait parfaitement le sort qu’on leur réservait a refusé devant tout le monde de donner sa petite fille. Un S.S. s’est approché : « Si tu n’obéis pas, je te tuerai ». Elle n’a pas obtempéré. Il lui a logé une balle dans la tête, elle est tombée à côté de la petite qu’elle adorait. Ce suicide « assisté » fut un message clair adressé à tous qui s’aveuglaient : la mort de son enfant était une certitude et, comme mère, elle n’aurait pas pu y survivre. Quant à Paula Biren, elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que c’est elle qui a tué ses parents. Lors de la liquidation du ghetto (le 3 août 1944), comme ancienne étudiante du Lycée rumkovskien, elle pouvait faire partie d’un train spécial. Mais elle a décliné l’offre : de fait, elle a voulu rester avec les siens, piégée par les mêmes liens de famille qui l’ont empêchée de fuir à l’Est quand c’était encore possible au début de la guerre et qu’elle n’a pas voulu ou pu les abandonner. Elle s’est donc retrouvée à Auschwitz où elle n’a pu être d’aucun secours pour ses père et mère assassinés. Or, elle a appris que le convoi dont elle aurait pu bénéficier était destiné à Theresienstadt, un camp de rassemblement, il est vrai de transit… Seulement sa parentèle aurait-elle été autorisée à l’accompagner ? Paula Biren n’a pu résoudre son problème de conscience que lorsqu’elle a renversé la question : « quand on vous a emprisonné, déshumanisé, vous n’avez pas à vous sentir mal de ce que les autres vous ont fait ! » Telle fut la perversité des nazis : ayant forcé les victimes à participer aux crimes, les bourreaux se dédouanèrent sur eux de leur responsabilité ! Or, se révolte notre dame, le monde entier, par son silence, a été complice. « C’est vous qui devriez-vous sentir coupables pour ce qui m’est arrivé. » Le film commence en plein air avec une femme bien de sa personne, presque enjouée, mais silencieuse, en plan général, sur fond de ciel bleu au-dessus de l’océan ouvert à l’infini, pour parler de l’enfermement sinistre qu‘elle a subi, - pour finir, à l’opposé, sur le close-up final, un gros plan du visage (serré dans le cadre), où affleure l’âme secrète de la femme rescapée, qui, après avoir libéré sa parole, tirant une dernière bouffée de sa cigarette, laisse échapper de sa bouche un peu de fumée, peut-être celle gardée en elle d’Auschwitz. Paradoxes de l’image, où se révèle, dans la tension audio-visuelle contradictoire de ce qui est dit et de ce qui est vu, la force expressive du cinéaste.

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